La lecture de la documentation m'a convaincu que, pour les épaisseurs, il ne fallait pas précisément suivre un modèle mais les "régler" sur la base de critères à définir. En fait il faut les réduire suffisamment...mais pas trop!
L'article de the Strad publié par Terry borman Path through the wood illustre la diversité des épaisseurs sur plusieurs violons célèbres et cette diversité montre bien que les luthiers avaient trouvé un moyen pour trouver la bonne valeur qui convenait au mieux aux plans et surtout aux bois utilisés.
Je n'utilise donc pas les plans du manuel sur ce chapître et je considère les cotes indiquées plutôt comme un minimum indicatif. Je préfère utiliser la méthode préconisée dans un autre ouvrage de référence: Manuel pratique de Lutherie de Roger et Max Milland.
De plus si nous(amateurs) n'avons pas l'oreille des anciens maîtres entraînée par des années de pratique, nous disposons d'outils modernes qui permettent de mesurer certains paramètres intéressants. Je retiens donc d' utiliser, en plus de l'approche de R&M Milland, des mesures de spectre acoustique, de fréquence de résonance et de masse sur les plaques au fur et à mesure de leur amincissement. Une approche détaillée de ce sujet se trouve à platetuning.org.et la consultation de ce site peut utilement se poursuivre par la lecture du document de référence de Erik Jansonn. On y trouve des indications précises de l'efffet de l'amincissement des plaques sur les fréquences de résonance obtenues qui permettent de compléter les instructions du livre de R&M Milland lorsque l'on s'approche de la cote finale pour l'épaisseur des plaques.
Je commence par le fond à la grosse gouge en suivant donc les indications de Roger & Max Milland.
A ce stade j'ai besoin d'un outil spécifique pour contôler régulièrement l'épaisseur. J'en ai réalisé un à partir d'un comparateur monté sur un support approprié (en haut de la photo suivante).
Un autre outil spécifique a son utilité, mais je m'en suis en fait assez peu servi. Il permet de poinconner des petis trous à une profondeur règlée préalablement. Il suffit ensuite de creuser jusqu'à ce que les marques disparaissent.
Le travail avance assez vite.
Les mesures acoustiques sont de deux types.
Il est possible de faire un relevé de spectre acoustique en disposant un enregistrement acoustique et en tapotant la plaque à des emplacements spécifiques http://platetuning.org/html/modes_-_tuning_plates.html. Ce qui est fanstatique c'est que le dispositif de mesure autrefois réalisé par du matériel de laboratoire sophistiqué est désormais à la portée de tous car réalisable avec un micro ordinateur personnel muni d'un logiciel libre, en l'occurence audacity.
Je montre ci après un exemple de spectre, le fond fait alors 160g et j'ai tapoté pour obtenir le mode 5 ( la définition des modes se trouve ici http://newt.phys.unsw.edu.au/jw/chladni.html#modes):
Je vais continuer à faire périodiquement ce type de relevés jusqu'à la cote finale.
C'est très intéressant mais l'identification des résonances sur le spectre n'est pas aisée et je ne trouve pas toujours les résultats obtenus très reproductibles! l'identification des pics de résonances est beaucoup plus nette si l'on crée les figures dites de Chladnli. (définition en Français ici: Wikipedia Figure de Chladni ).
Pour exécuter ce type de relevé, il est possible d'utiliser du matériel facilement disponible.
Un micro ordinateur animé d'un logiciel simulant un générateur basse fréquence a sa sortie casque branché sur une paire d'enceintes amplifiées. Ici l'amplificateur se trouve sur une des enceintes et la deuxième enceinte est en fait passive. J'en profite pour la remplacer par un haut parleur assez grand sur lequel je peux disposer mon fond en interposant quatre cales en feutre (il s'agit en fait de morceaux de sous couche de plancher). Sur le fond je dispose une poussière de feuilles de thé (la méthode est proposée par des Anglo/saxons!). Lorsque l'on fait varier la fréquence il apparait un moment où l'on voit très nettement se dessiner des figures géométriques qui illustrent le mode de résonance du moment. L'augmentation de l'amplitude de vibration est elle aussi clairement visible.
Je trouve ainsi les différentes fréquences de résonance et, là aussi, je renouvelle périodiquement l'opération au fur et à mesure de l'amincissement du fond.
En parallèle de ces mesures une pesée est réalisée. La balance roberval de cuisine qui me sert à doser la farine des crèpes fait parfaitement l'affaire pour une pécision de l'ordre du 1/2 g.
La littérature incite à rechercher la plaque la plus légère possible. Pour le fond je décide de m'arrêter à 130 g compte tenu de la cartographie des épaisseurs que j'ai obtenue. Les données finales sont:
Masse |
Mode 2 |
Mode 5 |
130 g | 178 Hz | 388 Hz |
Les fréquences sont issues des figures de Chladni. L'analyse de spectre donne des résultats flégèrement différents d'une dizaine de Hertz.
Mes derniers pointages de relevés d'épaisseur sont encore apparents sur la photo suivante.
A ce stade, et, avant de parler de la table, il faut que je vous présente mon assistant.
Il s' appelle Atis et dispose de son propre site: atis-chaton.
Il sait parfois se montrer très attentif.
Passons à la table.
Le travail est est le même que pour le fond avec les mêmes différences liées à la tendreté du bois.
Les figures de Chladni sont aussi remarquables.
Avec des épaisseurs voisines de l' objectif les mesures indiquent:
Masse |
Mode 2 |
Mode 5 |
78 g | 161 Hz | 289 Hz |
Le mode 5 est déjà un peu bas (par rapport aux préconisations de plate tuning.org) et, à ce stade je n'ai pas l'expérience qui me permette d'avoir un avis suffisamment arrêté sur la pertinence des objectifs que l'on peut se fixer avec l'analyse vibratoire. Je considère donc la table achevée et j'enregistre l'ensemble des valeurs comme point 0 pour le prochain violon.
La table est prète pour le percement des ouïes et la pose de la barre.
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- Écrit par jakez
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